• Points à la ligne

Publié le par brouillons-de-culture.fr

Une personnalité forte, qui transparaît au gré des interviews. Une plume régulièrement classée, depuis quelques années déjà, parmi les révélations littéraires. Tout semblait à priori réuni pour que j'aime le dernier livre de Marie N'Diaye, couronné par le Prix Goncourt.

Depuis longtemps, je m'étais promis de lire cet écrivain. Mais croulant sous l'ampleur de livres à dévorer, je remettais toujours cette promesse à plus tard.

Ndiaye

J'ai lu "Trois femmes puissantes" et je tombe des nues. Quoi, ce n'était que ça ? Bien sûr, au fil des pages, si toutefois l'on parvient au terme de l'ouvrage -mais je suis un lecteur tenace-, se dessinent des personnages qui ne manquent ni de densité ni d'intérêt. Mais le fait est indubitable : c'est une lecture épuisante, précisément en raison de ce qui fut tant vanté ces dernières années : le style, lourd et labyrinthique. Des phrases interminables, d'une valeur littéraire contestable, dont le point ne surgit parfois qu'au terme d'une page et quinze lignes. Du coup, on peine parfois à se souvenir du point de départ d'une telle logorrhée.

 

 

On pensera sans doute, au vu de ce qui précède, que je suis allergique à toute forme de modernité en littérature. Loin s'en faut … Toutefois n'est pas Proust, ni même Ravalec ou Imre Kertesz qui veut …

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Imre Kertesz est l'un des prix Nobel de Littérature de ces dernières années. De lui, j'avais lu le prodigieux "Etre sans destin", lecture secouante s'il en est, d'une écriture affirmée mais classique. Rien ne me préparait donc au choc de "Kaddish pour l'enfant qui ne naîtra pas". Plus de cent pages écrites pratiquement d'un bloc, où la virgule remplace souvent le point. Mais ici, on est soulevé par un souffle quasi poétique.

 

Certes la lecture n'en est pas toujours reposante et ne s'impose pas aux lecteurs pressés. Mais notre assiduité sans cesse se trouve récompensée. Chaque fois que notre attention tend à se relâcher, qu'on éprouve la tentation de vouer aux gémonies cet auteur qui respecte si peu notre confort de lecture, on est cueillis au plexus par une réflexion d'une profondeur inouïe, par une phrase qui tout en vous questionnant vous laisse bouche bée d'admiration, émerveillés par une phrase que l'on rêve de pouvoir recaser dans une conversation, histoire de faire intelligent.

 

En bref, tout le contraire de "Trois femmes puissantes". La différence s'appelle peut-être tout simplement la Littérature …

 

 

Pascal Perrot, texte

Gracia Bejjani-Perrot, graphisme

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